Films et séries

Bacurau de K. Mendonça Filho et J. Dornelles

« Étranger, si tu viens à Bacurau, viens en paix… » peut-on lire sur une pancarte filmée dans l’ouverture du film réalisé par Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles. Mais que diable viendrait-on faire à Bacurau, ce village perdu dans le sertão brésilien ? Si isolé que le long zoom satellitaire introductif semble interminable. Quand enfin, au milieu des hautes herbes vertes, des acacias et des cactus, se dessine une petite communauté de laissés-pour-compte évoluant au sein d’une enclave géographique mais aussi ethnographique, politique et culturelle. Les habitants de Bacurau se réunissent autour de leurs morts, de leur DJ à l’allure de barde modernisé, de leur musée, de leur église/débarras et s’accrochent à leur mode de vie qu’un gouvernement immonde et vorace tente d’annihiler. Privée d’eau, privée de réseau, disparue de la carte, la communauté se dresse fièrement et riposte contre sa disparition annoncée.

Dans ce film, le vert de la nature avec laquelle les habitants entretiennent une relation fusionnelle se mêle à l’ocre des maisons et au rouge du sang. Fable dystopique, western d’anticipation, le film de Mendonça se joue des limites de genre et dépeint une époque qui ne semble pas si éloignée de la nôtre. À l’heure où le président brésilien ignore les impératifs écologiques et méprise les populations indigènes, le scénario de Bacurau semble bien proche.

Le superbe jeu d’acteur de Barbara Colen, de Sônia Braga ou encore d’Udo Kier participe à la création d’un climat de tension quasi-insoutenable où le mystique côtoie la violence graphique alors qu’une frénésie meurtrière s’empare des protagonistes.

Et les cercueils partout s’accumulent …

Meï-Li Bellemare