Un enfant disparaît. Le point de départ de bien des romans, allant de l’exceptionnel Six Quatre au plus convenu Serre moi fort. En 2006, Cet été-là de Lee Martin était nommé pour le Prix Pulitzer. Il faut dire que sa description d’une petite ville typique et de ses habitants fait mouche. Quelque part surgit l’écho du Crime de John Faith, ce roman de Bill Pronzini dont il nous faudra parler un jour. Quant à Lee Martin, il a cette façon de vous rendre palpable les relations entre les personnages et plus que ça, le caractère et la souffrance de chacun d’eux. La petite Katie est l’héroïne disparue, elle et sa famille font envie à tous ceux qui croisent cette famille idyllique. Le père organise un barbecue convivial, Katie a un vélo aussi joli que sa frimousse blonde, son professeur de mathématiques l’adore. Mais pour certains l’harmonie fait écho à la solitude, l’assurance met en relief le doute, l’opulence contraste avec le peu, la popularité avec la mise au ban. Tout le monde ne possède pas une belle maison agrémentée d’une fontaine où nagent de nombreux poissons.
« Il est ancien, ce récit de désirs égoïstes et des regrets qui s’ensuivent »
Dans un crime, il y a plusieurs façons d’être coupable. Chaque personne qui a connu Katie, qui l’a croisée, a pu intervenir à un moment ou un autre. Comment gérer les conséquences, et les préjugés ? En choisissant une narration à plusieurs voix l’auteur suscite l’empathie pour chacun. Il joue avec les émotions et les certitudes du lecteur. Il lui donne presque l’impression qu’il aurait pu, lui aussi, éviter la disparition d’une enfant de 9 ans. Le tout avec une écriture très sensible, portée par les odeurs et les détails qui rendent de nombreuses scènes très vivantes. Culpabilité et vengeance sont poussés jusqu’au bout dans ce polar très moral.
Caroline de Benedetti
Lee Martin, Cet été-là, Sonatine, 2017, traduit de l’anglais par Fabrice Pointeau, 21 €, 320 p.