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Mange tes morts de Jack Heath

Mange tes morts de Jack Heath
photo Sean Davey

Timothy Blake voit tout, aucun détail ne lui échappe : il peut résoudre n’importe quelle énigme ou Rubik’s Cube. Ses capacités hors du commun font de lui un consultant précieux pour le FBI, en échange d’une faveur particulière : lui remettre les condamnés à mort afin d’assouvir sa faim dévorante. Malgré son dégoût profond pour ce régime alimentaire spécial, le directeur Luzhin est bien forcé de faire appel à lui quand le jeune Cameron Hall, 14 ans, disparaît en rentrant de l’école et qu’une rançon est demandée à sa mère. Accompagné par l’agent spécial Reese Thistle, Timothy va prendre conscience que cette affaire de kidnapping pourrait bien s’avérer plus compliquée qu’il n’y paraît au premier abord.

Jack Heath est un écrivain australien connu pour sa bibliographie jeunesse et Young Adult, qui comprend une vingtaine de romans. Pour sa première tentative dans le registre adulte, il n’a pas été timide et transforme habilement l’essai en réussite : sa jubilation à pouvoir écrire sans filtre, ni contrôle parental, est communicative. Mange tes morts est un roman rythmé, angoissant et délicieusement gore : on ne s’ennuie pas une seconde et on a même du mal à le poser. Pour nous rendre encore plus accro, chaque chapitre est introduit par une devinette (dont les réponses sont fournies en fin de roman), un petit clin d’œil malin au hobby du personnage principal.

Alors qu’il a dépassé depuis longtemps la limite ultime de l’anthropophagie, ce anti-héros est quand même attachant. Son envie irrésistible de viande humaine le rend incapable d’entretenir des relations sociales normales : il ne peut s’empêcher d’imaginer son interlocuteur dans son assiette. Entre Dexter Morgan et Hannibal Lecter, ce sympathique cannibale nous rappelle surtout Sheila de la série de Netflix Santa Clarita Diet pour son humour. C’est cette touche décalée qui apporte tout son sel à l’intrigue : on rit de situations plus cocasses les unes que les autres telles que le réveil et la fuite impromptus d’un condamné, ou la bagarre à coups de fémur congelé.

Justine Vaillant

Jack Heath, Mange tes morts, Super 8 éditions, traduit de l’anglais par Charles Bonnot, 2018, 19 €, 400 p.