Le heaume est un casque enveloppant la tête et le visage, muni d’ouvertures pour les yeux, que portaient les hommes d’armes au Moyen Âge. Dans le roman de Justine Niogret le heaume le plus marquant est celui de la Salamandre, personnage fait d’os plus que de chair, suivi de près par le heaume du Sanglier, avec sa ténacité de guerrier sauvage.
Si le roman sent le cuir, le feu et le sang il n’est pas que masculin. Chien du heaume est une femme, une femme au visage dur et aux mains noires sur laquelle crachent les hommes. Tout le monde n’a pas la gueule d’ange de Noalle, douce enfant recueillie par le Sanglier, mais véritable poison en belle robe.
Les armes s’entrechoquent, tout de même moins que les pensées et les souffrances des personnages. Chien recherche son nom véritable et le pays qui l’a vue naître. Le Sanglier vit les derniers temps d’un monde fini. Le forgeron frappe le fer en attendant le retour de la guerrière qu’il aime. Pendant ce temps, la religion étend son emprise sur un monde qui va reléguer les femmes au rang de génitrices. Et si les quêtes de ces personnages n’étaient pas grand chose au regard de ce qui compte, le présent ? Justine Niogret raconte tout ça comme on manie une épée, assenant les coups violents puis délicats. Voilà sans aucun doute le point fort du roman, qui surclasse le reste : l’écriture.
» (…) alors un jour viendra, je le présage, où une femme ne pourra plus toucher un fer sans passer pour folle, et où elles tireront toute fierté de leur langueur. Il leur faudra un homme pour défendre leur honneur, et la chose sera si bel et bien rivetée à la tête des gens que, comme un clou dans sa planche de bois rincée par les pluies, on ne saura l’en faire sortir sans se faire saillir les muscles à en avoir mal. »
Ajoutons un élément important. Même si l’histoire se déroule dans un monde violent, même si la misère y existe, la plupart des personnages sont animés par de belles intentions, généreux et solidaires. La liberté et la droiture leur importent. Cet aspect des relations entre les individus prime sur le reste et procure une sensation inhabituelle. L’altruisme ne s’invite pas si souvent comme héros des romans.
Il paraît que Chien du heaume se range dans la fantasy. On peut y voir un roman historique baignant dans un léger fantastique.Surtout, on a aimé.
Caroline de Benedetti
Justine Niogret, Chien du heaume, 2009, Mnémos, 226 p., 18€, réédition J’ai Lu, 2011