Voilà un livre à savourer. Si vous avez aimé ces histoires improbables, comme Epépéé de Ferec Kerenthy, Hôtel Jasmin est pour vous. Jasmin Ramadan joue avec la dualité du monde, n’hésite pas à placer de petits décalages dans son roman et déroute délicatement le lecteur. Il faut faire ce voyage à l’Hôtel Jasmin.
« Des fois on perd de vue des membres de son entourage le plus proche, c’est juste de la sélection biographique naturelle. »
Christian Tarbenbek disparaît, son fils Roland la cherche. L’enquêtrice fantomatique Laila Voss interroge les proches, et ces confessions sur dictaphone forment le récit. Le portrait d’une femme se dessine en même temps que celui d’une ville, d’une société et des angoisses propres à chacun. Hôtel Jasmin est un roman psychologique, il pique et il attendrit. L’écriture (servie par la traduction), glisse et emporte le lecteur.
Différents portraits émergent : un ex-flic reconverti en créateur de moutarde, une copine égoïste auteure de romance, une patronne de bar compatissante, un voyageur, une vendeuse de grand magasin… Tous ont en commun cette difficulté à exister. Vivre, mourir ? Vivre fatigue, titrait Izzo… Entre convenances et hypocrisie, Christine remet en cause l’ordre des choses et la place qu’elle occupe. Connaît-on vraiment ses proches ? Un enfant doit-il forcément rester lié à ses parents ? Christiane se dévoile au lecteur, et découvre qui elle est : une femme confrontée à la difficulté d’être honnête avec elle-même, et les autres. Le lecteur fait un beau voyage qui, comme tout voyage réussi, le renvoie à lui-même.
Caroline de Benedetti
Jasmin Ramadan, Hôtel Jasmin, 2018, Asphalte, traduit de l’allemand par Alexia Valembois, 22€, 304 p.