Il y a toujours un parfum de nostalgie dans les livres qui parlent de musique. L’évocation littéraire de groupes ou de morceaux que nous connaissons nous renvoie souvent aux moments où nous les découvrions, à une autre époque ; aux souvenirs. Mais ce n’est pas vraiment avec cette corde sensible qu’Arnaud Gauthier a décidé de jouer. La mélodie sanctuaire extrapole une autre question… Stairway to Heaven, Blowin’ in the wind, Redemption song, Dear Prudence ou les Suites pour violoncelle seul de Jean Sebastien Bach, qui n’a pas été entraîné par ces morceaux ? Que se passerait-il si un groupe, tout à coup, trouvait un Still Loving You ou un Smell like teen spirit puissance dix ? Une musique qui attraperait l’air du temps en même temps que l’histoire de l’humanité ? Voilà le propos du livre.
Le roman n’a de cesse de troubler les lignes entre réalité et fiction. Les groupes connus et les mélodies célèbres se mêlent aux inventions d’Arnaud Gauthier, tant et si bien que l’on se laisse emporter. Du coup, on y croit, à cette mélodie universelle venue du fond des âges – et qui rappelle la façon dont le monde a été créé chez Tolkien – ; on se laisse aspirer dans le tourbillon de notes.
Le roman n’oublie pas de nous parler de la musique actuelle, des GAFA et des nouvelles technologies ; des algorithmes qui cherchent le tube, le hit qui fera vibrer et danser le monde entier.
De la statue de bronze de Mérimée qui s’anime, à la VHS qui tue de Ring de Koji Suzuki, l’œuvre d’art possède parfois une puissance terrifiante. Arnaud Gauthier nous propose une variation du thème avec ce thriller ésotérique et musical.
Emeric Cloche
Arnaud Gauthier, La Mélodie Sanctuaire, Le mot et le reste, 2019, 256 pages, 20 €