Et si ?… Avec deux petits mots la littérature imagine tout. Des choses complexes, d’autres plus simples. Et si nous étions subitement privés d’électricité ? La grande panne de Hadrien Klent fait de cette catastrophe une farce satirique. Plutôt drôle.
Tout part d’Italie. Une mine de graphite explose dans un attentat, dégageant un immense nuage qui prend feu au contact des lignes haute tension. Le nuage arrive vers la France. Que faire ? Le gouvernement décide de couper l’électricité et de se replier sur l’île de Sein. Un beau symbole de communication, cette île d’où les résistants sont partis rejoindre de Gaulle en 1940. Pendant ce temps, la France retourne à la bougie.
Dans ce capharnaüm, un grand patron de presse décide d’imprimer son journal à l’ancienne et de faire circuler les messages grâce à des pigeons. Pendant ce temps, les services secrets et la police sécurisent le gouvernement insulaire, et pistent les gauchistes parisiens qui rêvent de profiter du chaos pour rejouer la Commune. Jean-Charles est un Julien Coupat à peine dissimulé.
Le plaisir est indéniable, à suivre ce délire qui met en scène les coulisses politiques. Trois anciens amis de lycées, éloignés par la vie, se retrouvent autour de cette grande panne. Normand, l’ancien conseiller politique retiré à Sein, voit débarquer ses ex-collègues des ministères, et son ex tout court. Nathanaël l’antiquaire vient jouer les taupes. Et Emiliano… remue tout ce petit monde. Il faut compter avec un PR (Président de la République) un peu maboule.
Hadrien Klent imagine une situation de catastrophe qui évoque le Covid, avec une France assignée à résidence (mais sans couvre-feu, comme quoi, le pouvoir de l’imagination…). Chacun devra affronter ses idéaux passés, et choisir son avenir, alors enfin la situation se débloquera. Après Et qu’advienne le chaos, évoqué dans L’Indic n°7, il reste à découvrir Paresse pour tous, le nouveau roman de l’auteur.
Caroline de Benedetti
Hadrien Klent, La grande panne, Le Tripode, 2016, réédition poche 2020, 360 p., 11 euros