Les lectures

L’Origine du Mal de José Carlos Somoza

Il y a toujours quelque chose de fascinant dans les histoires de manuscrit trouvé. D’abord, parce que ce genre d’histoire commence par une mystification. Qui peut vraiment croire que l’auteur du livre n’est pas l’auteur du manuscrit ? Ensuite, parce qu’elle permet à l’auteur de se mettre en abîme, d’écrire à la place de quelqu’un d’autre.

Le manuscrit qui nous intéresse ici est celui d’un phalangiste espagnol, soldat, fils de soldat. En mission de déstabilisation au Maroc puis en Algérie, il trouve que les français se comportent bien mal avec les autochtones. « Je ne connais que trop le Mal, mon fils : il s’empresse toujours de te signaler où est le Mal. » Et il n’y a pas que les forces de l’ordre qui se comportent mal avec les autochtones. « Les hommes, comme les animaux, doivent faire ce que l’on attend d’eux, et ce qu’on attendait des Arabes dans cette maison, c’étaient qu’ils travaillent. »

Roman d’espionnage mâtiné de roman policier légèrement ésotérique (« mais qui sont ces sorcières ? »), L’origine du Mal raconte une histoire d’amitié, de trahison et de vengeance. En plaçant une partie de l’intrigue de nos jours, au moment d’une prise d’otages, José Carlos Somoza offre également une réflexion sur le pouvoir des mots. L’auteur s’éloigne de l’univers fantastique qui est habituellement le sien. Il aborde sans filtre le réel et l’Histoire, et perd au passage une partie son originalité et de sa force.

Caroline de Benedetti & Emeric Cloche.

José Carlos Somoza, L’Origine du Mal, traduit de l’espagnol par Marianne Millon pour Actes Sud, 2021. 410 pages, 9,50 Euros en Babel Poche en 2024.