L’histoire d’amour sert à merveille la littérature, et celle racontée par Benoît Philippon a sa place dans la catégorie Polamour.
Il s’appelle Roy parce que ça sonne mieux que Raymond, il est grand et il fait le gros bras pour les truands. Sur internet il rencontre la poupée Guillemette. Elle n’a pas sa langue dans sa poche et apprivoise le géant à la sale gueule. Leur nouvelle vie débute avec un cadavre, et les voilà sur la route, une route à la fois violente et éclairée par leur chaleur de deux cabossés enfin réunis.
Rien de nouveau dans cette histoire où il ne faut s’attendre à aucune surprise. L’auteur en fait un poil trop, pour nous montrer la sensibilité doublée de rage (la Bête) qui habite Roy. On lui pardonne, car c’est un premier roman et que l’écriture réussit à faire partager l’émotion, le sexe entre Ray et Guillemette, la violence des hommes, l’espoir en quelques rencontres. Scénariste, Benoît Philippon sait aller à l’essentiel, avec des dialogues comme il faut. Les quelques personnages secondaires valent le coup, à l’image de la vieille Berthe à qui le couple tente de piquer sa 2CV. « Il a voulu visiter mon grenier et mon arrière-train. Il a pris un coup de pelle dans le crâne. (…) J’ai pas fait l’armée mais j’ai fait la guerre. »
Le rouge sang devient presque rose bonbon, à mesure que Ray et Guillemette, ces prolos d’aujourd’hui, avancent droit sur un chemin bancal. Parfois le fort et le faible s’allient, mais qui est le fort, et qui est le faible ?
Caroline de Benedetti
Benoît Philippon, Cabossé, Série Noire, 2016, 18 €, 270 p.