« Imaginez Vol au-dessus d’un nid de coucou réécrit par Elmore Leonard », dit Ken Bruen en 4e de couverture de ce roman, Les Incurables. Je dirais surtout : lisez plutôt Le Charlatan, ce superbe Série Noire de W.L. Gresham. Il possède la force et l’ambiguïté qui font défaut à Jon Bassoff, tout en étant assez proche du sujet traité. Voici l’histoire d’un médecin qui veut guérir les autres et à travers eux la mère qu’il n’a pas pu sauver. Lui et ceux qu’il croisera sur son chemin, reflètent la manipulation et ce notre vie devient sous le joug des autres. Mais jamais l’auteur ne réussit à incarner ses personnages : le Dr Freeman ne dépasse pas le stade de l’illuminé psychiatre, qui côtoie le fils de l’illuminé prêcheur, et l’illuminée jeune prostituée en quête de l’improbable fortune cachée par sa folle de mère. Peu importe que Freeman se soit inspiré d’un personnage réel incontestablement fabuleux, ici seule la fiction nous importe.
Le roman n’est qu’obscurité, dans le vocabulaire, la misérable ville où vivent les personnages solitaires, et leur dégueulasserie à tous. Chacun porte son drame et sa tentative d’en sortir à sa façon. Dans le numéro 7 de L’Indic, un article d’Emeric Cloche s’intitule « Tourner en rond dans le noir » et c’est un peu l’impression laissée par ce roman. Le drame qui monte nous indiffère, car tout manque de nuance. Il n’y a d’espoir nulle part, le fil des rencontres et des événements est couru d’avance et les quelques passages réussis ne rattrapent pas la sensation de vacuité de l’ensemble.
Caroline de Benedetti
Jon Bassoff, Les Incurables, Gallmeister, 2018, traduit de l’américain par Anatole Pons, 21,80 €, 233 p.