Depuis quelques temps déjà, le roman policier et criminel se projette dans de légères anticipations pour nous parler du monde. La plupart de ces anticipations politiques mettent en avant l’arrivée au pouvoir de l’extrême-droite (Robin Cook, Jérôme Leroy, Thierry di Rollo…).
Collapsus de Thomas Bronnec campe un président écologiste qui a pour ennemi les riches. Le projet ? Sauver la planète et la sauver rapidement. La méthode ? Pierre Savidan n’aime pas les contre-pouvoirs et se sent investit d’une mission. Le résultat ? Le pays bascule dans une société autoritaire.
Si vous êtes là, c’est que vous avez besoin de changer vous aussi, reprend Pedro Etchepare. Vous êtes ce qu’on peut appeler des gens aisés. Vous mangez de la viande deux fois par jour, vous voyagez pour les vacances, vous possédez une belle bagnole, vos enfants étudient dans des universités cotées et payantes à l’étranger.
Dans Collapsus les riches subissent la répression policière que subissent habituellement les pauvres et les militants des causes écologistes et sociales. L’anticipation est osée. L’État profond, un journaliste du journal de 20 heures et un industriel volent au secours de la République (et le droit de manger de la viande quand on veut)… Collapsus inverse la tendance et on a parfois du mal à y croire, mais c’est là justement un des atouts de l’anticipation : nous montrer ce qui pourrait arriver en nous sortant de nos présupposés. Le roman risque de vous secouer un peu.
Les personnages ne sont pas en reste : solitude, parcours de vie, sexe sont explorés avec la même finesse que la politique. À lire assurément.
Emeric Cloche
Thomas Bronnec, Collapsus, Gallimard/Série Noire, 2022, 462 pages, 20 Euros