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Utopiales 2018, jour 4

C’est samedi et pour une fois la Cité des Congrès est plus calme que les matinées précédentes. À 10h débute la rencontre sur le corps dans la SF chinoise ; nous vous en parlerons dans le numéro de L’Indic à paraître en décembre.

Utopiales 2018, jour 4Les Utopiales proposent un si grand nombre de conférences qu’il est difficile de choisir. Il est parfois possible de saisir au vol quelques échanges en scène Shayol ou Hetzel. D’autres rencontres ont lieu dans des salles et les visiteurs doivent patienter dans des files d’attente souvent impressionnantes. Ce matin nous avons pu écouter brièvement David Meulemans, Sylvie Denis et Élizabeth Vonarburg rendre hommage à Ursula K. Le Guin. Retenons qu’elle ne fait pas de littérature à message mais propose une littérature d’expérience, comme celle de l’identité sexuelle ou de l’anarchisme. Ce qui se rapproche de la distinction que l’auteure faisait entre les termes américains « message » et « meanings ». Ursula K. Le Guin est une romancière du sens.

Les 12 merveilles de la SF

Utopiales 2018, jour 4La rencontre « Point Pop » permet de poser les bases de la science-fiction et de ses classiques. Essentiellement masculins comme beaucoup l’ont noté, puisqu’aucune femme ne figure en couverture du hors-série de ce magazine.
Il faut lire de la SF, selon Pierre Bordage, pour se divertir, proposer des pistes de réflexion, poser des interrogations philosophiques. Gilles Dumay ajoute que la SF est une culture qui va de la série Z à des chefs d’œuvre absolus. S’il fallait citer un livre : Dune de Frank Herbert, dépaysant et choquant. Il rappelle que la SF est née avec une femme, Mary Shelley (Frankenstein), et sa création d’un savant fou. Concernant Hypérion de Dan Simmons, Gilles Dumay explique être gêné par ce par ailleurs bon roman, parce que c’est « le livre de quelqu’un qui a conscience de faire un chef-d’œuvre ».
Bien sûr, comme toute littérature de genre, la SF s’interroge sur le rejet qu’elle suscite chez certains lecteurs. Souvent parce qu’ils projettent des fantasmes et ne la connaissent pas. Un conseil pour ceux-là : La Stratégie Ender. Gilles Dumay préconise des livres qui ne soient pas trop agressifs au niveau des idées, Replay de Ken Grimwood, Cristal qui songe de Theodore Sturgeon, ou encore Robert Charles Wilson. Bien sûr Philip K. Dick est à éviter pour un débutant. Pierre Bordage recommande Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes. Quant à David Meleumans il oriente vers des textes classés en littérature générale, comme Kafka ou Orwell.
Une particularité de la SF, et une possible explication à son rejet, peut être à chercher dans les couvertures des romans. C’est un monde différent de celui de la « littérature ». On peut pourtant voir que dès lors qu’un auteur, comme Houellebecq ou Dantec, devient une marque, on ne vend plus le genre auquel il se rattache. Gilles Dumay poursuit en évoquant les débuts du genre, les couvertures pulp, Lovecraft, l’après 1929, l’émergence d’une culture avec des auteurs autour de Lovecraft, ces univers du weird, de l’étrange et de l’horreur.
La question des étiquettes et du classement se pose. Le lieu, le rayon où certains auteurs seront publiés pose un débat impossible à trancher. Certains veulent s’en affranchir, d’autres ont besoin de s’appuyer sur le genre SF et sa communauté pour espérer une visibilité. Le débat s’achève sur le lien entre le roman et le cinéma : la supériorité des séries est décrétée, tout comme celle du roman sur l’adaptation. Le mot de la fin ? La science n’a pas cessé de fournir de la matière à la SF.

Courts-métrages session 5

Utopiales 2018, jour 4Rust in Peace (W. Wells, USA) c’est un robot qui aime un homme dans la poussière et le désert. Il se réveille dans une décharge et rentre à la maison. La science-fiction explore aussi bien les sentiments que le futur. Ugly (N. Diakur, Allemagne) est filmé en images de synthèses colorées et expressives, un chat cabossé va être aidé par un chaman indien qui habite en haut d’une tour d’immeuble. 72% (L. Quilez, Espagne) aborde le problème du manque d’eau ; le court-métrage n’a pas la même temporalité qu’un long métrage, certains courts paraissent s’étirer de manière indéfinissable. Walking Meat (Shinya Sugaï), un manga rafraîchissant, redynamise la séance avec une histoire d’élevage de zombies. Riley was here (J. Rhoads & M. Marrero, USA) se rapproche lui aussi du film de zombie de manière originale, et très bien jouée et réalisée ce qui ne gâche rien à l’histoire. Spinning Record (E. Downe, Grande Bretagne) est un film d’animation qui a le mérite d’être court. Lo siento mi amor (E. Casanova, Espagne) revisite l’assassinat de Kennedy à la sauce complot ultime. On ressort de cette session heureux de voir que le film de zombie peut trouver d’autres voix ; par contre on notera qu’aucun court-métrage ne se déroule dans un univers médiéval fantastique ou de renaissance fantastique.

Mais la journée n’est pas finie, il nous reste des choses à vous raconter et ce soir aura lieu la cérémonie de remise des Prix…

Caroline de Benedetti
Emeric Cloche