C’est le livre lui-même qui a stimulé la création de No collection. Il ne correspond absolument pas à la collection Noir et il n’était pas question de le sortir au format virtuel dans la collection Arobase. J’ai tenu à en faire un bel objet. C’est l’histoire d’un coup de cœur pour un ovni.
C’est une histoire de pirates dont le personnage principal et narrateur est un perroquet. Sous la plume de Hafed, ce récit complètement déjanté est un prétexte à nous parler du monde et des individus curieux qui l’habitent. C’est un récit métaphorique animé par une étonnante galerie de personnages, humains et animaux confondus, mais qui parlent tous la même langue (ce qui ne facilite pas pour autant les choses). Ça débute sur l’océan et ça s’achève dans le désert – c’est sans doute une des plus fortes métaphores du récit, et il faudra que je parle de Nietzsche avec Hafed, un de ces jours. Sous le crayon de Laurence, c’est savoureux et diablement pimenté.
Pour éveiller la curiosité du public, dixit Hafed. Pardi ! Mais les moins de 16 ans en ont vu d’autres, tandis que moins de 12 serait plus justifié, même s’il n’est pas prévu de faire figurer cette mention sur le livre. Le récit grouille néanmoins de scènes tordues où tous les vices imaginables et les péchés se combinent entre brigands de toutes espèces, animaux itou et trois divinités. Coco est une parodie orgiaque au sein d’un corpus humain dénué de morale et d’autorité. C’est la loi du plus fort qui règne, ou plutôt du plus barbare.
Cependant, dans cette jungle trash et livrée à elle-même, Hafed trouve encore le moyen de raconter une histoire d’amour entre deux oiseaux rares. C’est la petite touche d’espoir du récit ; une façon de dire que si on baisse les bras et qu’on persiste à raisonner chacun pour soi comme c’est si souvent le cas ici bas, alors tout est fichu. Tout s’effondre. C’est l’âge de pierre avec options fours micro-ondes et climatisation.
Un premier tirage assez restreint est prévu, mais si le livre fonctionne il sera retiré. Ce projet est une expérience, tant pour les auteurs que pour la maison d’édition. Hafed l’a écrit en partie en prison et il l’a soumis à sa sortie à Laurence avant de le terminer. Je suis tenté d’en parler comme d’un trip – bon ou mauvais, la question n’est pas là. Une parenthèse dans le parcours compliqué d’Hafed. À l’exception du public dont il disposait quand il était prisonnier, Hafed n’a pas dû se demander une seule fois ce qu’en penseraient ses lecteurs. Alors j’ignore quel public Coco est susceptible de toucher.