Charles Bukowski fait partie des grands auteurs américains du XXème siècle. Son œuvre protéiforme, souvent autobiographique, est empreinte de ses errances, de foutre, et de cuites mémorables. On retrouve avec Sur l’écriture sa gouaille incomparable au travers d’une anthologie de ses correspondances qui s’étale sur l’ensemble de sa carrière littéraire de 1945 à 1993.
Avec ses lettres envoyées à ses amis, à des éditeurs ou encore aux écrivains qu’il admirait, il nous fait partager son quotidien, et ses réflexions sur la poésie et la littérature. Il répond aux nombreuses lettres de refus du début de sa carrière. Il égratigne le milieu de la Beat Generation et les universitaires qui enseignent « l’art de l’écriture ». Il s’emporte contre ses « poètes qui mentent », qui pensent que seul les gens cultivés peuvent comprendre et apprécier la poésie. On le découvre aussi plus pudique et sensible lorsqu’il évoque sa fille.
La spontanéité de ses échanges épistolaires n’enlève rien au style brut et provocateur de l’auteur du Journal d’un Vieux Dégueulasse, bien au contraire. À tel point qu’on a parfois l’impression qu’il apportait autant de soins à la rédaction de ses lettres qu’à celle de ses poèmes ou nouvelles. Le ton se fait juste un peu plus respectueux, lorsqu’il s’adresse à Henry Miller ou John Fante, son dieu littéraire – comme il le disait lui-même. Au-delà de la caricature parfois pathétique de l’alcoolique turfiste, on sent un véritable amour pour la littérature et la prose. Plus qu’une passion, l’écriture semble être pour lui une raison de vivre. Avant que le succès n’arrive c’était écrire ou crever ; les quelques dollars ramassés permettaient de payer le loyer et le ruban de la machine à écrire.
Très souvent drôle, profondément touchant par la sensibilité et la rage qui s’en dégage, Sur l’écriture donne une furieuse envie de se replonger dans l’œuvre de Buk, et de retrouver Henry Chinaski, son double littéraire, pour une virée dans le L.A de Avec les damnés.
Jean-Marie Garniel
Charles Bukowski, Sur L’écriture, Au Diable Vauvert, 2017, traduit de l’anglais (États-Unis) par Romain Monnery, 336 p., 20 €