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Surface de Olivier Norek

Surface de Olivier NorekAprès l’exploration du 93 qui l’a fait connaître, et un détour par la jungle de Calais qui m’a laissée très dubitative, Olivier Norek se met au vert. Ses précédents romans portaient la marque d’une vision policière de sujets de société, parfois intéressante, parfois très corporatiste.
Son dernier roman, Surface, en se tournant vers l’intime et le drame familial, ne se prête plus à ce genre de critique. À peine pourrait-on lui reprocher de donner dans le polar rural à la mode, c’est sans compter sur la petite pique qui remet certains romans à leur place :

« Vous n’avez qu’à dire qu’ici nous sommes des taiseux, des hommes de la terre et pas des hommes de lettres. Cela s’ajoutera à la longue liste de vos clichés sur la campagne. »

En envoyant sa flic parisienne défigurée et traumatisée, Noémie Chastain, dans un territoire banal, l’auteur gagne en simplicité dans l’écriture et la narration. Il y a bien une romance guère surprenante, mais surtout la confrontation de deux mondes et une grosse ambiance.

« À Paris vous êtes adeptes du tout scientifique. Empreintes, caméras de surveillance, écoutes téléphoniques, géolocalisations, drones, ADN ou encore balistique. (…) Tout cela parce que vous ne savez rien, ni des auteurs, ni des victimes. Alors vous cherchez ailleurs, forcément. Ici, nous commençons toujours par l’humain, parce que nous le connaissons. »

Olivier Norek utilise de vieilles ficelles, mais il le fait bien, sans rien de tape à l’oeil. La policière blessée incarne l’habituel personnage d’étranger qui arrive dans une ville et pose un regard neuf, dévoilant les secrets. Dans Un pied au paradis Ron Rash peignait un monde qui meurt et l’engloutissement d’une vallée. Ici le village a déjà disparu et le pire a déjà été commis. Seule la vérité peut émerger et réparer quelques âmes cabossées. Le décor aveyronnais joue pleinement son rôle et la présence du village sous les eaux (Avalon) amène une dose fantastique bienvenue. Les odeurs, les sensations, la souffrance, tout est palpable.

Caroline de Benedetti

Olivier Norek, Surface, Lafon, 2019, 19,95 euros, 430 p.