J’ai découvert Hannelore Cayre avec Comme au cinéma et son humour piquant ne m’a jamais déçue. Richesse oblige ne fait pas exception.
« Dans une communauté fermée il y en a toujours un par génération qui fait chier. Le genre d’engeance toujours impliquée dans la grosse affaire du moment. Quand une résidence secondaire est visitée ou qu’une bagnole brûle… Lorsque des langoustes disparaissent des viviers ou que les murs de l’embarcadère sont tagués en pleine saison de propos orduriers contre les touristes… Bref, dans la génération de ceux nés dans les années 80, la chieuse historique c’est moi : Blanche de Rigny. »
Richesse oblige sort en librairie à l’heure du confinement. Sans Covid-19 le roman aurait « simplement » provoqué des échos avec le contexte social des manifestations. Mais un bon roman a cet avantage de fonctionner à toute époque. D’autant qu’Hannelore Cayre entend montrer que notre 21e siècle nous rapproche surtout du 19e. Pas pour tout le monde, certes… Ce que nous constatons, à l’heure des premiers de corvée. Si l’espace d’un instant la crainte émerge de retrouver le même motif que dans La Daronne – un portrait de femme seule qui veut s’en sortir et trouve une combine – la crainte ne dure pas. Les de Rigny tissent le fil d’une saga familiale et leur fortune ancestrale permet à l’autrice de traverser l’Histoire en y propulsant l’émotion.
Hannelore Cayre a une autre qualité : ce qu’elle veut montrer ne prend pas le pas sur le fait qu’elle raconte une histoire. Nous sommes au coeur du roman noir, celui qui démonte le mécanisme d’un crime insidueux nommé lutte des classes. Blanche de Rigny le rend palpable à travers ce voyage dans la généalogie d’une famille, du présent aux années 1870, de Paris à une ile au large de Brest. De la fureur à la fureur.
Caroline de Benedetti
Hannelore Cayre, Richesse oblige, Métailié, 2020, 18 euros, 217 p.