Peu d’informations sont disponibles sur l’autrice coréenne Song Si-woo. On peut lire sur le site internet de l’éditeur que deux de ses romans ont été adaptés en série. Mais il est difficile de les trouver. Reste que Le jour du chien noir offre une belle porte d’entrée sur la Corée d’aujourd’hui.
Au cœur de l’histoire, deux enquêtes permettent d’aborder un sujet atypique : la dépression. Le jeune avocat Park Shim veut comprendre le crime commis par son client, quand le flic Lee cherche qui a tué la jeune femme dont le corps a été retrouvé dans la montagne. Pas de longue exposition de la vie intime des héros chez Song Si-woo, mais des faits, et un développement psychologique.
« J’ai l’impression que les Coréens attachent à l’esprit humain une dimension mythique. Admettre qu’ils souffrent de troubles mentaux est une atteinte à leur fierté. »
Le portrait de chaque protagoniste, et les discussions entre Park Shim et Bo-dlin, son amie psychiatre, éclairent le sujet de la consommation d’anti-dépresseurs. Avec Le jour du chien noir Song Si-woo évite l’effet didactique, façon collage Wikipédia, sans doute grâce au ton des dialogues. Le crime apparaît dans sa banalité, celle de la violence qui couve dans une société de contraintes, d’injonctions et de frustration. Un mal moderne dont les caractéristiques débordent la spécificité coréenne.
« (…) ne restent que l’incertitude économique et la précarité de l’emploi. On est obsédé par la stabilité, même si elle est hors de portée. On ne voit pas d’autre mode de vie. Et on en devient malheureux. »
Le mystère s’articule autour du blog « No depression », créé par un père endeuillé et révolté par le suicide de son fils de 12 ans. Autour de lui, quelques hommes et femmes en sevrage de médicaments se réunissent. Cet étrange groupe de parole cache la triste vérité. Il faudra la ténacité et la perspicacité des personnages pour dénouer les fils. L’enquête en dit autant sur la fragilité de l’esprit humain que sur une société moderne avec sa pression sociale et ses fantasmes de bien-être uniformisé.
Caroline de Benedetti
Song Si-woo, Le jour du chien noir, Matin Calme, 2020, traduit du coréen par Lee Hyonhee et Isabelle Ribadeau Dumas, 19,90 euros, 304 p.
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