Après The Witch (2016) et The Lighthouse (2019), Robert Eggers signe avec The Northman un film avec des plans surprenants et des scènes très réussies.
The Northman conte la triste histoire d’un homme écrasé par un chant de force surpuissant : sa destinée ou ce qu’il croit être sa destinée. Le jeune viking Amleth a un but dans la vie : venger son père. Devenu un guerrier berserk il suit un parcours fait de haine, d’amour et de violence. Une légende dont s’inspira Shakespeare…
Le film évite soigneusement certaines scènes clichés du genre, les viols, par exemple, ne sont pas montrés. Il a pourtant un côté violent avec des passages et une mise en scène spectaculaire qui font penser à des chansons de Black Metal. Les combats violents et bestiaux restent théâtraux et cinématographiques. Certains plans et effets de caméras sont osés (le rite de passage d’Amleth dans le monde adulte est un bon exemple), laissant planer une ambiance à la Conan le Barbare. On regrettera cependant l’utilisation parfois trop appuyée des images de synthèse…
Si les acteurs Alexander Skarsgard dans le rôle d’Amleth, Nicole Kidman en reine Gudrun, Ethan Hawke (le roi assassiné), Willem Dafoe et Björk (le sorcier et la sorcière) et Anna Taylor-Joy (l’esclave slave) sont connus, on oublie de les reconnaître, engloutis que nous sommes par le film. Une puissance narrative inhabituelle se dégage non pas de l’histoire (une légende scandinave), somme toute classique, mais de la façon dont elle est filmée (entre Rambo et The Witch).
La musique (Robin Carolan & Sebastian Gainsborough) est présente sans en faire des tonnes et englobe les scènes. Elle participe pleinement à la puissance du film (notamment dans les moments de sorcellerie) avec des percussions tribales, des cuivres angoissants et des violons dansants.
The Northman est aussi une œuvre qui questionne le culte de la force et de la virilité mis en avant dans les mythes et légendes. Amleth est écrasé par la vengeance et la violence, comme dans les films We Own The Night (James Gray) ou Rambo : Last Blood. Des champs de force (un destin, une tradition) le dépassent et l’emmènent, lui et celles et ceux qu’ils croisent, dans la mort et la tristesse. Les personnages féminins ne sont pas plus libres, ni plus positifs que les personnages masculins. La lecture du livre de Camille Le Boulanger Le chien du Forgeron s’impose.
Emeric Cloche.