Dans la gueule de l’ours de James A. McLaughlin propose une belle variation sur le thème de l’homme en fuite. Rice Moore sort de prison. Il a payé cher le fait de passer de la drogue entre les États-Unis et le Mexique. Sa deuxième vie commence dans une réserve des Appalaches dont il est le nouveau gardien.
Il y a bien quelques défauts dans ce premier roman. La mise en place traîne un peu, et les flashbacks sur le passé de Rice Moore sont dispensables. L’intrigue se noue autour de trois axes. Le viol de l’ancienne gardienne Sara Birkeland, le trafic de vésicules d’ours tués sur la réserve, la traque de Rice par un sicario du cartel. C’est quand Sara rejoint Rice sur la réserve que l’histoire prend de l’ampleur. Leur errance dans le canyon, le trip halluciné de Rice camouflé au milieu des animaux, les descriptions de la nature, offrent les plus belles pages de ce roman. On passe alors sur les caractéristiques qui transforment le gardien en super guerrier. En s’alliant avec le peu d’amis qu’il se fait parmi les habitants, en comprenant la faune qui l’entoure, Rice pourra rompre le fil de la violence. Pour un temps.
« Les limites qu’il s’était posées se dissolvaient – l’objectivité scientifique, le langage, les récits, jusqu’à la conscience de soi. Il essaya de ne pas s’inquiéter. »
Dans la gueule de l’ours raconte une vengeance et la façon dont un homme s’affranchit de son passé. On y côtoie ces américains attachés à leurs armes, et à l’accès au territoire de chasse. James A. McLaughlin livre une sorte de La griffe du chien plus centré sur la nature que sur le trafic de drogue, mais tout aussi dopé à l’action. Le roman produit un mélange inégal et réussi entre plusieurs registres. Lauréat du Grand Prix de Littérature Policière, l’auteur est assurément à suivre.
Caroline de Benedetti
James A. McLaughlin, Dans la gueule de l’ours. Traduit de l’anglais par Brice Matthieussent, Rue de l’échiquier, réédition J’ai Lu 2021, 416 p., 8,50 euros