« Mais quelle est la pire chose que tu aies vue ? »
Les réseaux sociaux inondent ordinateurs, tablettes et téléphones. Ils nécessitent une horde de travailleurs pour fonctionner et le développement de l’Intelligence Artificielle va renforcer cela. Leurs conditions de travail ne seront sûrement pas enviables. Elles sont déjà déplorables.
Dans ce court roman épistolaire Hanna Bervoets décrit la vie d’un groupe de modérateurs de contenu. Confrontés à des textes, des images et des situations terribles qu’ils doivent analyser et classer le plus vite possible, ils tentent de ne pas basculer dans la folie. Comme dans tous les emplois précaires, des liens se tissent entre les travailleurs, il faut bien survivre. Livrés à eux-même face à des tombereaux d’ignominie plusieurs heures par jour, ils s’organisent comme ils peuvent. Une tension et une gêne se déploient au fur et à mesure que Kailegh rédige sa lettre à un avocat qui tente une action collective contre la plateforme de modération Hexa pour laquelle elle travaillait. Quelque chose d’insidieux s’immisce petit à petit jusqu’au drame.
Un drame pas si terrible pourra-t-on penser dans un premier temps, mais qui n’en sera pas moins glaçant et qui vous hantera longtemps après votre lecture.
Les choses que nous avons vues est le premier roman traduit en français de Hanna Bervoets ; il a été suivi en 2023 par L’Expérience Helena toujours chez Le bruit du monde.
Emeric Cloche
Hanna Bervoets, Les choses que nous avons vues, traduit du néerlandais par Noëlle Michel pour Le bruit du monde, mars 2022, 147 pages 16 Euros.