Les amateurs de polar, et ceux de littérature américaine, établiront rapidement la filiation en découvrant Richard B., résidant à San Francisco. Brautigan n’est pas loin. Le personnage de ces Evaporés est un détective, bien sûr. Celui-ci se dit poète.
L’amour que Richard B. porte à Yukiko va le mener au Japon, à la recherche du père de cette dernière. Fait-il partie des centaines de disparus qui chaque année fuient leurs dettes ? Cette possibilité fait écho à un fantasme : changer de vie. Tout à coup, devenir un autre. Richard, Yukiko et son père, tous en ont la possibilité dans cette histoire. Tout comme Akainu, l’enfant rendu orphelin par le tsunami et la catastrophe nucléaire. Que vont-ils faire ? Auront-ils le courage ? Dans cette enquête le poursuivant en apprend autant sur lui-même que sur le poursuivi. Thomas B. Reverdy ne fait pas un roman exotique sur le japon, il croise des personnages et « fait écran », à l’image de la description du métier de détective, « dernier voile, celui qui permettait de regarder la vérité sans se faire mal. (…) Il sait surtout donner à ce grand déballage une solennité douce, dénuée de tout jugement de valeur »…
La vérité sur Kaze, le père de Yukiko, n’a pas tant d’importance que la trajectoire qu’il a suivie. L’auteur part d’un fait réel, ces évaporés du Japon, et y ajoute les causes et conséquences de Fukushima : « Dans un roman français, ils n’auraient jamais pu retrouver son père, et, dans un roman américain, ils auraient pu le ramener chez lui. Mais c’était la fin d’une histoire japonaise. »
Caroline de Benedetti
Thomas B. Reverdy, Les évaporés, Flammarion, 2013, réédition poche 2015, 7,20 €, 317 p.