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Sa Majesté Clodomir de Christian Casoni

Sa Majesté Clodomir de Christian Casoni

La référence mérovingienne du titre sur fond de tapisserie démodée et de détails connotant vaguement une vieille noblesse d’épée semblent annoncer un polar historique médiéval. Mais l’épigraphe initiale indique une autre direction : un extrait du prologue de la loi salique (Vive le Christ qui aime les Francs, qu’Il protège leur royaume, qu’Il éclaire leurs chefs de la lumière de Sa grâce) est immédiatement suivi d’un aphorisme emprunté à  Jane Birkin (Avant d’ouvrir le gaz elle pense à son canari). Le ton est donné. Avec Sa Majesté Clodomir de Christian Casoni nous sommes bien dans un polar contemporain, non dénué d’humour.

L’intrigue présentée par l’éditeur a pour ressort principal un trafic d’antiquités dans lequel s’affrontent violemment deux clans, dont les querelles remontent au Haut Moyen âge. On s’attend à un joyeux pastiche d’Ellis Peters. Erreur ! Si le style est plein d’humour, l’intrigue est très sérieusement documentée et le voyage dans le temps et les terres australes parfaitement plausibles. Commencée dans un pavillon de banlieue par la découverte des cadavres de ses occupants après un cambriolage – fait-divers somme toute banal – l’histoire prend une ampleur inattendue. Les cadavres s’accumulent à un rythme soutenu. La vieille noblesse d’épée côtoie des petits délinquants, emploie des tueurs professionnels et traite avec la mafia calabraise.

Côté police, la composition et l’évolution des effectifs est tout aussi étonnante. À sa tête, chargé de l’enquête sur les premiers meurtres, le commandant Victor Maniabosco, « Bosco » pour les intimes. Ce monomaniaque n’écoute que les chansons de Birkin et aime à citer Gainsbourg (Son Zip et son Zippo fendu de A jusqu’à Zoo). C’est lui le « héros » du roman, pas un flic « atypique » comme il y en a tant, un personnage dont l’épaisseur romanesque surprend (on verrait bien Depardieu dans le rôle). La plus grande qualité de ce premier (!) roman se trouve sans doute dans ce soin apporté aux personnages, tous les personnages, le troisième couteau  comme le chef de clan. L’ancien professeur d’histoire, « érudit en dynastie mérovingienne » comme le descendant du roi Clodomir. On attend avec impatience le prochain roman de Christian Casoni, conteur et styliste remarquable.

Jocelyne Hubert.

Christian Casoni, Sa majesté Clodomir, Le mot et le reste, 2022, 483 pages, 23 Euros.