Une ZAD est une zone à défendre. Il en existe plusieurs en France. Jean-Bernard Pouy en imagine une dans le Nord, créée par opposition à un projet de « plateforme multimodale ». Chez lui, cette zone à défendre est autant champêtre qu’intérieure. Qui suis-je ? Voilà le problème de Camille. En défendant un territoire, ce quarantenaire trouve surtout une motivation dans sa morne vie d’employé de supermarché. Son trafic de légumes et de palettes le transforme en « zadiste périphérique ».
Visionnaire, l’auteur ? Dans Ma ZAD : « Le 17, fête à tout casser sur le site. » Dans le monde réel, jeudi 17 février le premier ministre annonce l’abandon du projet de nouvel aéroport à Notre Dame des Landes. Fête à Nantes et sur la ZAD. Mais le lendemain, il faut temporiser. Des contrôles sont signalés à Vigneux de Bretagne, Héric, Fay de Bretagne, la Paquelais, le Temple de Bretagne. Dans le roman : « Au moins trois compagnies de CRS, mais, pour l’instant, ne filtrant pas les allées et venues. À mon avis, ce statu quo ne durerait pas longtemps. »
L’errance de Camille, à la recherche de lui-même, est une invitation à prendre les chemins de traverse. Son parcours depuis le Ch’nord jusqu’au littoral breton en passant par la Lettonie s’appuie sur autant de digressions : la musique de Dylan et Gong, l’asperge de Manet, le cinéma, la bonne chair, l’amitié… En prenant ces chemins plutôt que ceux des détails de la vie d’une ZAD, Pouy évite le risque de caricature des différentes composantes. Reste une fin abrupte, une écriture reconnaissable, et quelques pages de liberté, d’humour et d’espoir. Comme dans la vie qu’on se fait.
Jean-Bernard Pouy sera à Nantes les 9 et 10 février pour une rencontre à la librairie L’Atalante.
Caroline de Benedetti
Jean-Bernard Pouy, Ma ZAD, Série Noire, 2018, 18 €, 208 p.