L’Horloger de Jérémie Claes entraîne le lecteur dans un thriller aux airs de conspiration internationale. Quand un journaliste dévoile les liens entre la fraternité aryenne et les hommes politiques, il récolte un Prix Pulitzer, et les emmerdes. Et si tout avait commencé des années plus tôt ?
Voilà un premier roman qui n’a rien à envier aux grandes productions américaines. Tout juste pourra-t-on trouver quelques longueurs à ce récit qui court de 1942 à 2019, de Auschwitz à un village de Provence français. C’est là que Jacob Dreyfus entre dans le programme de protection des témoins, avec son jeune fils. Sa famille menacée, décimée, c’est auprès de policiers chargés de sa sécurité qu’il trouve de nouveaux soutiens. A peine de quoi l’aider à continuer de vivre. Car la vengeance déployée contre Dreyfus, par sa violence et sa pérennité, semble démesurée.
Jérémie Claes fait s’affronter deux camps. D’un côté des personnages soudés par leur humanité et des valeurs communes, de droiture et de justice. Autour de Dreyfus, le flic Solane, Lucie et le Busard forment un cocon protecteur pour l’homme traqué. En face se dessine petit à petit des tueurs, des commanditaires, des puissants. Un Maître des Machines, un Scorpion, un Horloger. Le choix des noms donne le ton du roman. Il ne vise pas forcément au réalisme et s’en éloigne d’ailleurs au rythme des révélations. L’histoire avance au son du piano de Monk, dont la musique canalise la souffrance de Dreyfus. Les odeurs de l’arrière-pays cannois, le vin et la cuisine appréciés par l’auteur sont les rares pauses heureuses pour les protagonistes.
Difficile de lâcher le roman car il joue sur une envie simple : comprendre. L’auteur abuse certes un peu des méandres de son intrigue, du diabolisme de certains personnages. Mais il joue également avec un monde en mutation, au potentiel néfaste augmenté par le tout numérique et des supers puissants aux richesses exponentielles. Sur le fil du complotisme et du fantastique, il donne envie de voir se déployer son univers dans un deuxième roman.
Caroline de Benedetti
Jérémie Claes, L’Horloger, éditions Héloïse d’Ormesson, 2024, 464 p., 22,90 €