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Mater dolorosa de Jurica Pavičić

Mater dolorosa de Jurica Pavičić

Jurica Pavičić et les femmes. Leur rôle dans la société est le cœur qui bat dans chaque histoire de l’auteur. Elles y tiennent toujours une place majeure. Mater dolorasa, après L’eau rouge et La femme du deuxième étage, n’y déroge pas. Comme le dit bien le titre.

Les femmes, et aussi la Croatie, la ville de Split avec ses cicatrices de l’ère socialiste. Près du port, l’ex-zone industrielle est le lieu du crime. On y retrouve le cadavre d’une jeune fille. La soirée en boîte de nuit semble avoir connu une fin tragique. Dès lors, un policier, Zvone, va s’employer à trouver le coupable. Classique.

Mais, c’est Jurica Pavičić qui raconte. Avec lui, la peine et la souffrance exsudent des personnages. Ils vivent dans les vestiges d’une époque rêvée, idéalisée. Plein emploi et logements ouvriers flambants neufs. Le père de Zvone, mais aussi Katja la mère de famille, ont vu ces rêves s’effondrer. Leurs enfants s’en sortent à peine mieux. La jeune Inès travaille dans un hôtel touristique et rêve d’indépendance. Son frère Mario traîne à la maison, chouchou immature d’une mater dolorosa. Katja se repose entièrement sur la religion. Inès s’oublie en étant la maîtresse du patron de l’hôtel.

Le crime agit comme un grain de sable. L’enquête va montrer que Mario apparaît sur une photo avec la jeune morte. Sans le brandir sous notre nez, Jurica Pavičić parle de la lutte des classes et d’individus face à leurs actes et leurs choix. Il est question de l’amour et de ce qu’il provoque, qu’il s’agisse de l’amour d’une mère pour son fils, l’amour d’un fils pour son père, de celui d’une amante aveuglée. En démêlant le fil des sentiments, la vérité surgit. La justice, c’est moins sûr. Et le lecteur reçoit un uppercut final.

Caroline de Benedetti

Jurica Pavičić, Mater dolorosa, Agullo, 2024, traduit du croate par Olivier Lannuzel, 416 p., 23,50 €