Le rire du grand blessé, un roman de science fiction d’anticipation de Cécile Coulon, nous avait laissé un goût de fable. Seule en sa demeure, roman gothique, possède un parfum de conte. Voyez vous même : dans un grand domaine mangé par la forêt, on trouve la jeune femme pleine d’illusions, le nouveau mari qui n’est pas ce que l’on attend, le fantôme d’une première épouse, le beau serviteur muet et sauvage, la bonne qui a élevé son fils et le fils du maître et de la maîtresse de maison, la préceptrice qui vient donner des cours de musique… n’en jetez plus, on vous a dit que le roman est gothique. Il fait la part belle aux ambiances du genre et nous pouvons ici convoquer sans problèmes Daphné du Maurier, Jane Austen, les sœurs Brontë.
Gothique donc. Ce qui semble être n’est pas. Les personnages, archétypaux, se révèlent moins grossiers qu’au premier abord. Et par-delà le mystère et le poids des conventions sociales, le désir. Une histoire vieille comme le monde.
« Qui êtes-vous, Mademoiselle, demanda le directeur d’un ton très calme en avisant l’annulaire nu de son interlocutrice… »
La condition féminine du XIXe siècle est largement abordée. Le roman parle des femmes et de ce que la société attend d’elles. Si le mystère prend son temps pour apparaître, il plane dès le début de l’histoire. Le style factuel, qui laisse tout apparaître les sentiments de l’ingénue et innocente héroïne, est empreint d’effets poétiques plus ou moins discrets. Ils font le style de Cécile Coulon.
Emeric Cloche
Cécile Coulon, Seule en sa demeure, L’Iconoclaste, 2021, 333 p., 19 €

