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Antoine, un fils aimant de Sandrine Cohen

Antoine, un fils aimant de Sandrine Cohen

Le polar rend compte des maux de notre société. Ce propos maintes fois répété ne l’est pas pour rien. Antoine, un film aimant de Sandrine Cohen apporte une pierre à l’édifice. Le deuxième roman de l’autrice française fait écho à la violence commise par des adolescents. Si celle-ci n’est pas nouvelle, ses formes ont interpellé et choqué la société ces derniers mois.

Dans son premier roman Rosine : une criminelle ordinaire, Sandrine Cohen imaginait une mère tuant ses deux enfants. Avec une certaine logique, l’histoire se renverse ici et commence par un appel à la police : « Madame, j’ai tué mon père. » Clélia, l’enquêtrice de personnalité, est de retour pour trouver des réponses à cette éternelle question : pourquoi ?

« Elle roule trop vite à moto, elle boit, elle baise, elle se noie dans des oublis temporaires. Et elle se bat. Elle avance dans la vie comme on boxe sur un ring, à coups d’adversaires, de bleus, au corps et à l’âme, et de solitude. »

Clélia est omniprésente dans le roman, l’histoire défile par ses yeux et ses pensées, ses considérations, sa rage, ses humeurs. Clélia se contient, Clélia s’en veut, Clélia s’agace, Clélia prend sur elle, Clélia bout, Clélia fulmine… Son caractère hyper marqué donne parfois envie de poser la main sur son épaule pour lui dire « oh la, un peu de calme. » D’autant qu’elle avance dans cette enquête grâce à des intuitions presque magiques, car elle perçoit des phrases, ce que d’autres ne voient pas dans certaines situations.

Revenons sur le crime. Antoine, dix-sept ans, a-t-il tué son père ? Le roman explore l’histoire familiale, la personnalité de la mère, Cybèle, et de la petite sœur Mélissa, mais aussi celle de la grand-mère paternelle et de la tante. L’enquête pose la question de l’emprise et de l’origine de la violence intrafamiliale. À défaut de prétendre détenir les réponses, l’autrice insuffle beaucoup d’émotion dans ce roman. Elle ne se contente pas des évidences, et cherche à travers ses personnages comment rompre le cycle.

Caroline de Benedetti

Sandrine Cohen, Antoine, un fils aimant, Belfond, 2025, 20 €, 384 p.