La Fille du train (adapté au cinéma) – le roman qui a fait connaître l’autrice britannique – avait quelque chose d’Alfred Hitchcock. Angle Mort de Paula Hawkins possède un indéniable côté « farce », une farce sinistre. Les ingrédients sont classiques. Le décor : une maison sur la falaise balayée par les embruns (le gothique est assurément un ancêtre du polar…). La situation : un triangle de personnages (femme, homme, homme) liés depuis l’adolescence. Sans oublier un secret (bien sûr), et un meurtre dès le premier chapitre. Et puis il y aussi un quatrième mousquetaire. Mais déjà, j’en dis trop.
La psychologie des personnages, à peine esquissée, se cache dans leurs actions (surtout leur passé). Peu d’informations sont données sur les protagonistes, empêchant un pathos trop appuyé ainsi que les tours de passe-passe émotionnels évidents. On cherche alors à deviner qui est qui, et qui fait quoi, dans cette relation à trois. L’ambiguïté du roman noir plane – pas dans le style, on est ici du côté du roman psychologique. Les champs de force sont flous. Et pour cause… le bonheur d’Edie, Jake et Rayan est une image, un fantasme.
Ce roman court, une novella, où l’on devine assez vite qui a fait le coup, vaut surtout pour sa fin osée. Paula Hawkins survole, mine de rien, au détour d’une phrase (et avec son scénario) quelques sujets actuels. C’est malheureusement un peu court, non pas en nombre de pages, mais en émotion.
Emeric Cloche
Paula Hawkins, Angle mort, traduit de l’anglais par Corinne Daniellot pour Sonatine, 2023, 160 pages. 17, 90 €. En poche chez Pocket.