Il est long le chemin du retour de Attica Locke, marque la fin de la trilogie du Texas Ranger Darren Mathews, découvert dans Bluebird, bluebird. Le titre original, « Guide me home », dit comme le titre français qu’une boucle se referme. Celle d’années de colère et de souffrance pour le personnage ?
Darren Mathews est noir, dans un État dont les précédents opus ont montré l’étendue du racisme. Face à la « fragilité de la démocratie », le Ranger s’épuise à savoir s’il faut « rester pur dans la bataille ou se rouler dans la fange avec ses adversaires ». L’autre danger qu’il affronte, c’est celui des séquelles de son histoire familiale. Une mère alcoolique qui l’a abandonné enfant, un père mort au Vietnam, deux oncles divisés entre la loi et l’ordre, et lui au milieu avec l’envie de bien faire.
La mère de Mathews est femme de ménage dans la résidence d’une université où une jeune fille noire disparaît. Elle s’en inquiète auprès de son fils, malgré leur conflit. Voici le début d’un polar sans cadavre, avec une enquête au cœur des contraintes économiques qui pèsent sur les plus pauvres. L’enquête de Darren Mathews le mène à Thornhill, ville-entreprise dans l’esprit des familistères européens. Les employés y sont-ils aussi heureux que le montrent les images parfaites de leur site internet ? Que doivent accepter des américains sans couverture sociale et sans logement pour retrouver leur fierté ?
L’autrice américaine délivre un instantané parfait des motivations de l’électorat populaire pour un candidat républicain milliardaire, loin d’incarner leur classe sociale. Quant au Texas Ranger, en cherchant la vérité aux côtés de sa mère, il s’offre la possibilité d’écouter enfin la véritable histoire de sa famille. Et de rentrer à la maison.
Si vous avez envie d’en lire plus sur les États-Unis, allez voir aussi du côté de David Joy et Les deux visages du monde.
Caroline de Benedetti
Attica Locke, Il est long le chemin du retour, Liana Levi, 2025, traduit de l’anglais par Nicolas Paul, 22 €, 336 p.